Récemment, j’ai repensé à une discussion que j’avais eu avec une collègue il y a quelques années. Une graphiste formidablement créative. Nous nous entendions bien, autant professionnellement que personnellement. Nos caractères se ressemblaient.
Lors de cette conversation, nous faisions le constat que le monde de l’entreprise valorisait plutôt les personnalités dites extraverties (qui avaient des facilités à parler en public, à s’exprimer lors de réunions, à aller vers l’autre…) au dépend des caractères introvertis. Nous l’avions toutes deux remarqué, nos collègues extravertis étaient adaptés à l’univers de l’entreprise et réussissaient plus facilement.
Vous l’aurez compris, nous nous définissions toutes deux comme étant de nature plutôt introvertie. Nous n’avions pas toujours cette capacité à être expansif et communicatif dans nos interactions professionnelles. Un constat partagé par le financier Martin Delemotte dans cet article du Nouvel Obs où il parle du secteur bancaire : « J’ai remarqué que tout était organisé pour favoriser un certain type de personnalité, plutôt extraverti ». »
Le dictionnaire Larousse parle de l’introversion comme d’une « tendance à se replier sur soi ». Je trouve cette définition assez péjorative. Les introvertis étant perçus ici comme mal dans leur peau, voire asociaux. Mais si on revient aux racines de l’introversion, c’est tout de même autre chose.
Introversion vs extraversion
C’est Carl Gustav Jung qui a d’abord définit les deux attitudes en 1921 dans son ouvrage Types psychologiques. « La différence majeure entre les extravertis et les introvertis réside dans leur façon de se ressourcer : les premiers puisent leur énergie dans leurs relations aux autres, les seconds dans la solitude. » (Source Nouvel Obs)
Il parle des extravertis comme des individus ayant une tendance à s’intéresser aux objets externes (les autres, le monde) et des introvertis comme des personnes se concentrant plutôt sur leur univers intérieur. (Source Wikipédia) On voit déjà ici que l’expression « univers intérieur » est moins dépréciative que « repli sur soi », employée par le Larousse.
D’après cet article de Wikipédia, voici les caractéristiques des introvertis et extravertis :
- Les extravertis « tendent à se satisfaire des interactions sociales et à être enthousiastes, bavards, et assertifs notamment. Ils prennent plaisir à participer à des activités en groupe, comme des fêtes, des manifestations publiques, entre autres. La politique, l’enseignement, le management, les activités commerciales favorisent l’extraversion. Un individu extraverti préfère interagir socialement plutôt que de rester seul. »
- Les introvertis « sont plus réservés et moins bavards en groupe. Ils prennent plaisir lors d’activités solitaires comme la lecture, les écrits, l’utilisation d’un ordinateur, ou la balade. L’art, la musique, l’ingénierie, la sculpture et autres activités artistiques sont des professions hautement introverties. L’individu introverti prend plaisir seul plutôt qu’en groupe, bien qu’il puisse apprécier des activités entre amis. »
On s’aperçoit ici que les deux mécanismes sont aussi valables l’un que l’autre. Jung déclarait d’ailleurs que « ces deux fonctionnements ou attitudes coexistent chez chaque individu. » Il est également ajouté dans l’article qu’en « fonction des contextes de vie et de la constitution psychique de chaque individu, un mécanisme prédomine sur l’autre. » (Source Wikipédia). Personne n’est donc à 100% introverti ou 100% extraverti. Et de plus, cela change au cours du temps et en fonction des situations.
Réévaluer notre regard sur l’introversion
Au delà de l’observation que nous faisions sur le monde de l’entreprise, c’est notre société contemporaine qui ne met pas vraiment en avant les personnes introverties. Susan Cain, l’auteure du livre La force des discrets (recommandé par ma collègue que j’évoquais au début de cet article) en parle très justement dans sa conférence TED intitulée : Le pouvoir des introvertis :
Pour elle, les sociétés occidentales et plus particulièrement les États-Unis ont souvent favorisé l’homme d’action plutôt que l’homme contemplatif :
« Au XXème siècle, nous sommes entrés dans une nouvelle culture que les historiens appellent la culture de la personnalité. Nous sommes passés d’une économie agricole à un monde d’entreprises. Les gens se sont déplacés des petites villes vers les grandes villes. Et au lieu de travailler aux côtés de personnes qu’ils ont connues toute leur vie, ils ont dû faire leurs preuves parmi une foule d’inconnus. Ainsi, de manière compréhensible, des qualités comme le magnétisme et le charisme sont soudainement devenues très importantes. »
Pourtant, il n’en a pas toujours été ainsi. Susan Cain explique que « nous connaissions depuis des siècles le pouvoir transcendant de la solitude. C’est seulement récemment que nous avons commencé à l’oublier. » Heureusement, grâce à son ouvrage devenu un best-seller et à d’autres publications sur le sujet, comme le livre de la psychanalyste Laurie Hawkes : La force des introvertis, la lumière se fait petit à petit sur cette partie de la population qu’on estime tout de même entre 30% et 50% en France (Source les Échos).
Voici quelques-unes des nombreuses personnalités que Susan Cain définit comme introverties : Gandhi, Abraham Lincoln, Mère Teresa, Eleanor Roosevelt, Rosa Parks, Marcel Proust, Frédéric Chopin, Meryl Streep, Albert Einstein…
Je suis une âme discrète
En ce qui me concerne, j’ai voulu me conformer pendant des années au modèle extraverti. J’avais envie de ressembler à cette personne éloquente et à l’aise dans un grand groupe.
Mais ça aurait été aller contre ma nature. Je me sens bien chez moi, dans mon cocon, à lire des livres. Je ne suis pas asociale, je dirais plutôt que je ne suis pas une mondaine. J’aime les petits comités (les tête-à-tête ou les dîners à quatre étant les combinaisons que je préfère), me promener avec mes proches, faire du yoga, danser (la danse et le yoga étant je trouve, des activités hautement introspectives), parler au téléphone pendant des heures, faire des choses manuelles, dessiner, créer des objets, coudre, écrire… C’est d’ailleurs aussi pour cela que j’adore travailler sur ce blog. En tant qu’introvertie, internet a été une formidable opportunité d’expression. Je peux être dans ma bulle, prendre mon temps, approfondir ma pensée et on ne me coupe pas la parole !
J’apprends petit à petit à apprécier certaines de mes qualités dites introverties. Oui je n’ai pas beaucoup parlé à cette soirée, je n’ai pas été le centre de l’attention, je n’ai pas fait de blagues, ni de grands discours… Mais qu’importe ! J’ai observé, j’ai souri, je me suis imprégnée de l’énergie ambiante, j’étais dans la réflexion et présente aux autres.
Si vous êtes comme moi, sachez que vous apportez quelque chose de différent au groupe. Vous n’êtes pas transparent, vous êtes juste discret. Récemment, on m’a fait une remarque qui m’a fait réfléchir et qui m’a fait beaucoup de bien. On m’a dit que ma présence était apaisante. Depuis, c’est une chose à laquelle je pense lorsque je suis avec beaucoup de monde et que je tends à me dévaloriser parce que je suis en retrait.
J’espère que cet article vous aura intéressé et qu’il vous aura permis de voir d’un autre œil ces deux attitudes tout aussi valables l’une que l’autre. Espérons juste que les introvertis puissent se sentir peu à peu revalorisés dans nos sociétés.
Très bonne journée à vous et à bientôt sur le blog ! Retrouvez mes autres articles lifestyle ici.
Bonjour Léa,
Je suis comme toi, discrète (c’est moins péjoratif qu’introvertie, même si une ancienne supérieure hiérarchique me l’a reproché lors de mon départ !). On a bien le droit d’être un peu « différentes », de préférer se ressourcer, dans sa bulle. Aujourd’hui, je ne travaille pas et je viens de passer une journée parfaite, en tête à tête avec mon mari qui était en RTT : projets d’avenir, sport en écoutant un podcast (cléa cuisine, champs d’action, green letter club, 20 minutes avant la fin du monde, toits plumes… je suis plutôt branchée planète… mais je vais regarder tes podcast), jardinage, lecture, cuisine.
Moi aussi, j’ai beaucoup aimé lire « La force des discrets », on se sent bien moins seul et valorisé. Alors vive les activités calmes et ressourçantes seule chez soi, la couture, le bricolage, le yoga, la sophrologie, la lecture, la cuisine, le calme…
Et puis certaines personnalités extraverties sont vraiment envahissantes, écrasantes voire toxiques. Nous au moins on sait écouter et on a de l’empathie.
Alors, « Discrètes power » !!!
Véronique
Merci Véronique pour ce long commentaire et le partage d’expérience ! Merci aussi pour les podcasts mentionnés, c’est toujours chouette d’avoir des recommandations 😉
Et vive la différence ! 😊